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A TRAVERS LA PORTE…

Nouvelle de Gérard MOREL parue dans le N° 3269

de l’hebdomadaire NOUS DEUX (23 Février 2010)

 

Depuis plus de trente ans que je suis femme de ménage chez des gens de théâtre, je pourrais vous raconter bien des histoires. Toutes authentiques puisque, en écoutant aux portes, j’ai entendu ces gens vivre leurs amours ou leurs désespoirs, avec une intensité rare.

Même lorsqu’ils quittent la scène, les comédiens ont le sens du drame. Ils savent faire de leurs amours de véritables passions, et ils pleurent avec beaucoup plus de puissance que nous.

C’est même pour cette raison que je n’ai voulu travailler que chez des acteurs. Il me semble que je m’ennuierais si j’allais faire le ménage chez un médecin ou un avocat, car ces gens-là ne doivent pas savoir mettre en scène leurs liaisons ou leurs chagrins.

Bref, vous ne me croiriez même pas si je vous racontais les aventures auxquelles j’ai assisté, en écoutant aux portes ou en observant mes patrons dans le reflet des miroirs, ou même à travers les trous de serrure.

Vous allez sans doute me juger trop curieuse, mais sachez qu’en contrepartie, je suis discrète. C’est essentiel dans mon métier. Les comédiens qui m’emploient le savent, c’est même pour cette raison qu’ils me recommandent à leurs meilleurs amis. Ils savent que je n’hésite pas à revenir chez eux le soir pour finir de repasser leurs costumes ou d’astiquer leurs parquets, et ils me laissent écouter leurs conversations à travers la porte parce que je ne répète à personne leurs secrets.

Et si aujourd’hui, je m’autorise à révéler la vérité sur le drame qui s’est déroulé chez Monsieur Francis Ferval, l’ancien sociétaire de la Comédie Française, c’est parce que la police m’y a autorisée. De toute façon, l’assassin vient d’être arrêté, et avant trois jours, tous les journaux raconteront à leurs lecteurs chaque détail du crime, ainsi que ma participation à l’arrestation du meurtrier.

Je suis même assez fière de penser que c’est grâce à moi que celui-ci n’a pas réussi à commettre un crime parfait.

Mais vous devez d’abord savoir que j’ai connu Monsieur Francis Ferval grâce à sa première femme, l’actrice Julie Kohler. Je faisais le ménage chez elle bien avant qu’elle ne devienne célèbre. C’était en 2001. Elle était figurante au cinéma, et elle poursuivait une liaison avec un célèbre imprésario, dans l’espoir qu’il facilite sa carrière. Quand l’imprésario l’a abandonnée pour épouser une chanteuse débutante, Julie a failli en faire une dépression nerveuse. Car elle avait perdu trois ans avec lui, et elle craignait de n’être plus assez jeune pour attirer un autre imprésario ou un directeur de théâtre. Elle jurait de se suicider, et c’est moi qui l’ai encouragée à mettre sa menace à exécution, pour tenter une dernière fois de faire parler d’elle. Bref, elle a avalé une dizaine de somnifères, une heure avant que je ne vienne passer l’aspirateur chez elle et que j’appelle les secours. Comme elle avait laissé une lettre dans laquelle elle racontait sa liaison avec l’imprésario, la presse people a fait pleurer ses lectrices en racontant sa triste histoire. Madame Julie a même été photographiée en couverture de plusieurs magazines, et c’est ainsi qu’elle a obtenu son premier grand rôle au cinéma.

Un an plus tard, elle épousait Francis Ferval.

Bien sûr, elle a demandé à son mari de congédier sa propre femme de ménage, ce qui m’a permis de venir travailler pour eux. Et quand elle a divorcé de Monsieur Francis pour se remarier avec un jeune philosophe d’avant-garde qu’elle avait maintenant les moyens d’entretenir, elle m’a encore proposé de la suivre. Mais là, c’est moi qui ai refusé.

Et Madame Julie a compris ma décision. Elle savait que je me serais ennuyée si j’avais travaillé pour un intellectuel, aussi brillant soit-il, moi qui n’aime que les gens de théâtre.

Bref, je suis restée au service de Monsieur Francis.

En feuilletant son passeport, j’avais découvert qu’il avait presque cinquante ans, c’est à dire dix ans de plus que l’âge qu’il avouait dans ses interviews ou sur les programmes de théâtre. Mais il pouvait se le permettre, car il faisait assez d’efforts pour conserver une allure étonnamment jeune. Pour ne pas grossir, il me demandait de ne lui préparer que des viandes grillées et des crudités. Il allait à la piscine chaque matin, et il ne buvait presque pas d’alcool.

Sa seule faiblesse, c’était les femmes. Beaucoup de spectatrices étaient folles de lui et le guettaient à la sortie du théâtre, mais des comédiennes lui écrivaient aussi pour le supplier de jouer avec elles. Et lui, malgré tous mes conseils de prudence, il se montrait incapable de leur résister.

Chaque fois qu’il accueillait chez lui une nouvelle conquête, même après l’heure de mon départ, je le savais car le lendemain, je trouvais sur la table du salon deux petits verres à liqueur. Et le plus souvent, un énorme bouquet de roses anciennes dans le vase de l’entrée, car Monsieur Francis a toujours parlé de sa passion pour ces fleurs, et ses admiratrices lui en apportaient des brassées.

Certaines d’entre elles essayaient de se l’attacher, elles ignoraient qu’il rompait toujours avant une semaine, pour ne pas se créer d’habitudes. Jusqu’au soir où il a reçu chez lui Rosalie Régent. Celle-ci n’était pas plus jolie que les autres, et d’après les propos que je les ai entendus échanger le lendemain matin en faisant semblant d’astiquer les poignées de porte, elle n’était même pas amoureuse de lui. Au contraire, elle lui disait qu’elle ne pourrait guère être disponible pour lui, car elle craignait la réaction de son mari s’il découvrait leur aventure.

-Lorsque l’on aime une femme comme toi, on en reste esclave jusqu’à la mort, déclara Monsieur Francis avec son emphase habituelle.

Plus réaliste, Rosalie protesta :

-Mon mari n’est pas si amoureux. Il est surtout possessif.

Alors, Monsieur Francis se prit au jeu et voulut garder Rosalie. Pour elle, il devint même fidèle. Il ne garda des relations qu’avec sa première épouse, Julie Kohler, parce que depuis leur divorce, ils étaient restés très amis. Plus proches même qu’au temps de leur mariage, où ils entretenaient encore une certaine rivalité professionnelle.

Julie connaissait l’existence de Rosalie Régent et sans être jalouse le moins du monde, elle s’inquiétait de l’influence que cette femme prenait sur son ex-mari, au point qu’elle vint m’en parler :

-Croyez-vous qu’elle est sincère avec lui ? Je ne voudrais pas qu’elle le fasse souffrir. Même si je l’ai quitté pour me remarier avec Philippe, je lui ai toujours conservé mon estime et mon affection.

Tout en m’interrogeant, elle sortit de son sac un billet de cent euros qu’elle me glissa dans la main. De sorte que je me sentis obligée de lui dire que je la comprenais. Ce qui n’était pas du tout le cas, car même si, à l’époque, ils avaient informé la télévision et la presse de leur volonté de divorcer en restant amis, moi à travers la porte je les avais souvent entendu se disputer, notamment au sujet de la répartition de leurs biens.

Mais en somme, leurs anciennes querelles ne me regardaient pas.

Désormais, Rosalie venait retrouver Monsieur Francis tous les lundis soir, puisque c’était le seul jour où le théâtre de son mari faisait relâche et où donc elle n’était pas sur scène. J’appris un soir, en les écoutant parler à travers la porte, que son mari en profitait lui aussi pour se rendre dans un club privé et s’adonner à sa passion du poker. Il ne rentrait chez lui qu’au petit matin, plus ou moins ivre de jeu et d’alcool, et elle était donc convaincue qu’il lui suffisait de revenir avant lui pour qu’il continue à tout ignorer de sa liaison.

Si elle m’avait demandé mon avis, je lui aurais conseillé de se méfier davantage. Car elle et son mari habitait un immense duplex où logeait également un couple de domestiques, et je craignais que ces gens-là répètent à Monsieur Régent que son épouse découchait lorsque lui-même rentrait tard.

C’est le Lundi 18 Mars que, pour la première fois depuis le début de cette liaison, Rosalie téléphona en début d’après-midi pour me demander de prévenir Monsieur Francis qu’elle ne le rejoindrait pas ce soir.

-Un grand réalisateur me propose de venir faire un essai pour un second rôle dans son prochain film. Je ne pouvais pas refuser, car si je suis retenue, je débuterai enfin une carrière au cinéma. Ce serait merveilleux, n’est-ce pas ? Le réalisateur m’a promis de me réserver même plusieurs gros plans. Et j’interpréterai un personnage de femme volage, ce qui est le type même de rôle dont le public se souvient longtemps.

Je souris en pensant qu’elle n’aurait pas trop d’efforts à faire pour être crédible dans ce rôle. Mais, très poliment, je lui promis de transmettre le message à Monsieur Francis.

Je savais qu’il était tombé amoureux d’elle et qu’il serait déçu de son absence, mais je ne m’attendais pas à ce qu’il se montre aussi bougon ce soir-là. Lui toujours si courtois, il me fit plusieurs réflexions désagréables, au point que je me retirai plus tôt que d’ordinaire dans la cuisine, pour y ranger la vaisselle et préparer son déjeuner du lendemain.

J’étais en train d’essorer la salade quand on sonna à la porte. En temps ordinaire, je serais allée ouvrir, mais puisque Monsieur Francis s’était montré désagréable, je fis semblant de n’avoir rien entendu et je ne bougeai pas.

D’autant que je n’étais même pas curieuse de connaître l’identité du visiteur nocturne, qui selon moi ne pouvait être que Rosalie Régent. Ses essais avaient sans doute déçu le réalisateur, qui l’avait renvoyée plus tôt que prévu.

Si c’était le cas, elle devait être elle aussi d’une humeur effrayante, et je m’étonnais de ne pas l’entendre hurler tout de suite. Je pris donc la liberté de me rapprocher de la porte du salon rouge pour entendre ce qu’elle racontait à mon patron.

C’est alors que je découvris par le trou de la serrure que le visiteur nocturne de Monsieur Francis n’était pas Rosalie mais …un monsieur que je n’avais encore jamais vu !

Il était presque aussi grand que Monsieur Francis, mais il n’avait ni sa prestance ni son élégance. Et c’était en vain qu’il criait pour tenter de dominer Monsieur Francis, qui l’écoutait en retenant un sourire :

-Monsieur, hurlait cet homme, je vous répète que je suis le mari de Rosalie.

-Vous avez beaucoup de chance et je vous en félicite, ironisa mon patron.

-Ma femme est votre maîtresse. Je l’ai faite suivre, et j’ai la preuve qu’elle vous rend visite chaque lundi.

Monsieur Francis parvint à dissimuler sa surprise. Et ce fut encore sur un ton amusé qu’il répondit :

-Monsieur, je n’accepte de vivre des scènes de ce style que sur scène. Ici, je vous trouve ridicule et je crains de le devenir à mon tour. Aussi, je vous ordonne de sortir, sinon je devrai vous empoigner et vous jeter moi-même dans l’escalier.

Au théâtre, quand Monsieur Francis s’exprime ainsi, ses partenaires lui obéissent. Aussi s’attendait-il à ce que le mari de Rosalie fasse de même. Mais le visiteur était venu en agresseur et il n’entendait pas céder si facilement. Les deux hommes continuèrent donc de s’affronter, avec une telle intensité que je ne pus que rester avec l’œil collé contre le trou de la serrure.

Au moment où Monsieur Francis se rapprocha de son interlocuteur de façon vraiment menaçante, l’homme se mit à parler plus doucement. Je crus qu’il était dompté et qu’il allait repartir.

Mais au contraire, il sortit de sa poche un revolver, qu’il  braqua devant son adversaire :

-Je vous ai dit que j’aimais Rosalie. Pour garder une telle femme, je suis prêt à tout. Même à vous tuer. Allez-vous m’obliger à le faire ?

Malgré le courage dont il fait toujours preuve au théâtre, Monsieur Francis fut visiblement impressionné par le revolver. Il baissa le ton, et alla même s’asseoir, comme pour inciter son rival à se calmer lui aussi.

-Qu’attendez-vous de moi ? Même si je vous promets de la quitter, je resterai libre de la revoir dès que vous serez parti d’ici. Vous ne me surveillerez pas toujours avec un revolver à la main…

-Je sais, répliqua le mari de Rosalie. Mais j’ai tout prévu. Vous allez donc lui écrire sous ma dictée une lettre de rupture. Que je lui enverrai moi-même, pour être sûr qu’elle la recevra. Par la suite, vous pourrez bien raconter à Rosalie que vous ne pensiez pas un mot de ce courrier, elle ne vous croira pas. Et même si vous la persuadez que c’est moi qui vous ai obligé à écrire, elle ne vous pardonnera pas votre lâcheté face à moi. Bref, elle ne voudra plus de moi et nous reprendrons, tous les deux, le bonheur que vous avez interrompu.

Même par le trou de la serrure, on voyait bien que Monsieur Francis hésitait à céder. Mais finalement, il est allé s’asseoir à son bureau, en demandant à Monsieur Régent ce qu’il devait écrire.

Moi, derrière ma porte, je trépignais de colère, de le voir se soumettre ainsi. J’ai même envisagé de prévenir la police, pour qu’elle vienne arrêter Monsieur Régent en flagrant délit de menace de meurtre, mais celui-ci était armé et j’ai eu peur qu’en voyant surgir des policiers, il cède à la panique et tire sur Monsieur Francis.

Monsieur Régent a donc commencé à dicter, une lettre très étonnante :

« Ma chère Rosalie. Tu m’as fait découvrir un amour comme je n’en avais encore connu auprès d’aucune femme… »

Il a quand même expliqué à Monsieur Francis :

-Oui, cela peut vous surprendre. Mis il faut de la passion pour que Rosalie sente bien que la lettre vient de vous.

Et tout en jouant avec son revolver, il a poursuivi :

-« Néanmoins, notre histoire s’avère difficile à vivre. A cause de ma carrière et de ton mari. Je préfère te perdre et garder de toi un souvenir idéal. J’espère seulement que toi aussi, tu continueras à m’aimer. Dès que tu auras bu ton chagrin, je sais que tu me comprendras. Avant de m’approuver. Je n’aime que toi. Signé Francis Ferval. »

Monsieur Francis écrivait scrupuleusement sous la dictée. C’est seulement après avoir signé qu’il a fait remarquer à son rival que le texte n’était guère adapté à une rupture.

-Si. A une rupture de comédien. Vous autres, vous en faites toujours trop, surtout avec nos femmes, a ricané Monsieur Régent.

Il s’est emparé de la lettre. Et , d’un mouvement brusque, il a assené un coup sur la nuque de Monsieur Francis, qui s’est écroulé sur son bureau.

Si je n’ai pas hurlé, c’est que j’étais pétrifiée. Mais là, j’ai vu Monsieur Régent glisser tranquillement son revolver dans la main de son rival, puis redresser cette même main vers la tempe de mon patron et …tirer un coup de feu !

La scène avait duré à peine quelques secondes.

Alors, toujours aussi calme, Monsieur Régent a posé la lettre devant le corps de Monsieur Francis, il a rangé un peu le bureau, puis il s’est dirigé vers la porte et il est reparti.

Il devait être persuadé d’avoir commis un crime parfait, puisqu’il ignorait ma présence.

Mais moi, bien évidemment, aussitôt après avoir constaté que Monsieur Francis était mort, j’ai appelé la police. Et quand le commissaire est arrivé, avec le substitut du procureur de la république, je leur ai raconté toute la scène.

Ils ont noté mes déclarations, m’ont promis d’aller interroger Monsieur Régent dès le lendemain, puis ils m’ont ordonné de quitter les lieux et de n’y pas revenir, car ils allaient placer des scellés sur la porte, pour assurer la conservation des indices et des preuves.

C’est là que j’ai réalisé que je venais de perdre mon emploi.

A vrai dire, ce n’était pas ce qui m’inquiétait le plus. Je savais que plusieurs des amis de Monsieur Francis se proposeraient de me prendre à leur service, tant ils appréciaient ma disponibilité, et l’intérêt que je leur portais.

Mais huit jours plus tard, j’ai été convoquée au commissariat. Là, le capitaine Koch m’a brutalement annoncé qu’il me soupçonnait d’avoir menti et d’avoir inventé toute la scène. Car Monsieur Régent avait nié être l’assassin de Monsieur Francis. Et surtout, il avait présenté un alibi. Il affirmait être allé dîné ce soir-là, avec plusieurs amis. Qui avaient tous confirmé ses propos.

Evidemment, j’ai répondu au capitaine que ces gens étaient ses complices, mais celui-ci m’a rappelé qu’il connaissait son travail :

-D’ailleurs, parmi les invités de Monsieur Régent se trouvait Julie Kohler, l’ex femme de la victime. Selon vos propres paroles, elle était restée trop attachée à son ex mari pour offrir un alibi à son assassin, n’est-ce pas ?

Et avant même que je ne revienne de ma surprise, il a ajouté:

-Par contre, vous ne m’aviez pas dit que votre patron vous avait légué par testament une importante somme d’argent. Correspondant à dix ans de votre salaire. Et vous, vous étiez sur place au moment du meurtre …

Et voici que je me trouvais suspectée à mon tour !

J’en étais folle de colère et de honte, moi qui aurais été incapable de faire le moindre mal à aucun de mes patrons, et surtout pas à Monsieur Francis.

C’était d’autant plus injuste que j’ignorais que le malheureux m’avait légué une partie de sa fortune. Tant il est vrai qu’il était encore plus discret que généreux. Et puis, même si j’avais pu lire son testament, jamais je n’aurais tué un homme aussi gentil. Pas même pour hériter.

-D’alleurs, ai-je ajouté, même si Monsieur Francis m’offre dix ans de salaire, c’est dérisoire par rapport à la fortune qu’il avait amassée en vingt-cinq ans de carrière. Cherchez parmi ses autres héritiers ?

-Tout revient à son ex-femme, m’a confié le capitaine. Julie Kohler. Mais elle possède le même alibi que Monsieur Régent. Confirmé par leurs amis communs.

Bien sûr. De toute façon, je me doutais bien que ce n’était pas Madame Julie qui aurait pu prendre l’apparence d’un homme. Mais moi, j’avais vu Monsieur Régent. Et j’ai tellement insisté que, finalement, le capitaine Koch a accepté de me confronter à celui que j’avais dénoncé…

Et là, j’ai cru devenir folle. Car Monsieur Régent était plutôt petit et il ne ressemblait pas du tout à l’assassin de Monsieur Francis, tel que je l’avais vu.

L’enquête était bloquée. Surtout que le juge d’instruction a renoncé à me poursuivre, lorsqu’il a réalisé que sans mon témoignage, tout le monde aurait admis que Monsieur Francis s’était suicidé.

C’est seulement le matin des obsèques de mon patron que j’ai reconnu l’assassin, dans la foule des gens de théâtre qui était venue lui rendre un dernier hommage. Il tenait le bras de Madame Julie et n’était autre que son second mari, le philosophe !

Dès que j’ai averti le capitaine Koch et qu’il a été placé en garde à vue, il a avoué son crime.

Cet homme-là avait toujours été jaloux de Monsieur Francis, qui avait eu les moyens d’assurer à Madame Julie une vie luxueuse, et qui était devenu son meilleur ami après leur séparation. Au point de l’avoir gardée comme héritière principale : Madame Julie l’avait confié à son nouveau mari pour lui prouver la force de leur amitié.

Quand le philosophe d’avant-garde avait appris par Madame Julie que Monsieur Francis était prêt à refaire sa vie avec Rosalie Régent, il s’était douté que Julie serait bientôt éclipsée du testament de son ex-mari. Aussi avait-il eu l’idée de se faire passer pour le mari de Rosalie afin de dicter à Monsieur Francis une lettre de rupture qui était en fait une lettre d’adieu. Puis il l’avait abattu, estimant ainsi assurer définitivement la fortune de sa femme tout en se débarrassant d’un homme dont il était jaloux.

Vous pourrez bientôt lire le compte-rendu de ses aveux dans les journaux…

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